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Mon mot à dire
11 juillet 2009

Ouverture

Quand j'étais enfant, j'ai souvent entendu les adultes dire ou rabâcher doctement :

"il n'y a pas de mauvais outils, il n'y a que de mauvais ouvriers".

Il faut dire que dès mon entrée au CE1, j'ai commencé à très mal écrire. 40 ans plus tard, j'ai retrouvé de vieux cahiers de cette époque, l'évidence m'a sauté aux yeux : je n'écrivais pas mal, je personnalisais mon écriture. Ca peut paraître aujourd'hui surprenant, mais à l'époque, on se devait de copier scrupuleusement l'écriture ronde et harmonieuse qu'on nous avait appris au CP et que la maîtresse d'école s'évertuait à utiliser chaque fois qu'elle écrivait au tableau.

L'écriture ne devait pas se personnaliser, nous n'étions que des enfants à former. Forcément, même si c'était inconscient, je me refusais à entrer dans la case qu'on m'avait attribué. J'ai été punie, on m'a interdit d'écrire avec la plume trempée dans l'encrier sous prétexte qu'il y avait plus d'encre violette sur mes doigts que sur la plume, j'ai dû écrire au crayon de papier, puis j'ai eu droit au stylo bille qui fuyait et bavait sur la feuille jusqu'au jour où quelqu'un m'achetât... mon premier stylo à encre avec réservoir ; j'arrivais quand même à m'en mettre plein les doigts, mais moins souvent.

Aujourd'hui, le stylo à encre est à cartouche, cartouche de toutes les couleurs, il est joli, plaisant et adapté aux doigts d'une impatiente comme moi. J'écrivais mal, certes, mais j'écrivais vite.

Mais je voulais en venir à un autre point. Cette semaine, pendant que je travaillais, et que je n'arrivais pas à obtenir ce que je voulais, cette phrase m'est revenu en mémoire : "Il n'y a pas de mauvais outils, il n'y a que de mauvais ouvriers". C'était peut-être vrai il y a 50 ans, mais aujourd'hui, ça ne l'est plus. Dans mon entreprise, il y a de mauvais outils, parce qu'il y a des gens qui s'en moquent et qui ne veulent pas prendre le temps de fournir du bon matériel. De nos jours, on n'a plus le temps de rien, il faut des résultats avant tout.

Je travaille dans un atelier et cette semaine, j'ai constaté une fois de plus, que certains peuvent lancer une production sans concevoir un seul instant le minimum autour de ce nouveau produit, comme s'ils pouvaient croire que ce nouveau truc va sauter tout seul dans sa boîte, par un coup de baguette magique. Il y a un terme : logistique, je crois, mais visiblement quand on fait partie d'un autre service, on ne s'abaisse pas à concevoir  l'effet logistique de la production. Et le pauvre ouvrier se trouve devant un dilemne : "comment faire ?"

Débrouille-toi ! Je sais, c'est ce que je fais en général, ce que je faisais. Aujourd'hui, je revendique mon droit à ne pas penser. Puisque pendant des années, on m'a dit "t'es pas là pour penser" ou "t'es pas payé pour penser". Je ne pense plus pendant les heures de boulot ou je pense à autre chose. Mon travail consiste à travailler manuellement, du mieux que je peux et même plus, ce que je m'applique à faire depuis... longtemps maintenant. S'il y a lieu, je pense dans le cadre de ce que j'ai à faire, mais rien de plus. Parce que cette semaine, j'ai réalisé à quel point je ne m'aide pas en acceptant qu'on nous accuse de mal travailler, mes collègues et moi, alors qu'on ne fait que travailler avec ce qu'on a.

En l'occurence, après avoir fait des prototypes, le service Méthodes a lancé une production d'outils sans passer par la case amélioration, sous prétexte qu'il n'avait pas le temps de s'occuper des détails. Nous avons bricolé, pour mieux travailler sans pour autant arriver à bien travailler. Et je ne m'en sens plus du tout responsable et je le clame bien fort : "Il n'y a pas que de mauvais outils, il y a aussi, hélas, des outils mal conçus".

J'écrivais mal aux yeux des adultes parce que je prenais trop tôt mon envol dans ma quête de moi-même, mais aujourd'hui, je travaille bien parce que je sais que je fais de mon mieux.

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